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ALPES - GR5 - JOUR 18
18e jour – 4 juillet 2005
 
L’épicerie de Brevilliers a ouvert ses portes depuis trois mois grâce au concours de la Chambre de Commerce de Haute Saône. Le patron invite à renter dans la modeste pièce qui tient lieu de commerce où la plupart des produits de base sont proposés. C’est qu’il y tient le patron au soutien du département. Il espère aussi faire son chiffre l’été grâce au GR et aux randonneurs de passage. Je n’ose trop le contredire mais le sentier ici n’a rien de transcendant, alternant entre chemins vicinaux et routes goudronnées désertes centralisant peu d’intérêt ou de convoitises pédestres. La population prend un peu la relève et tente de conserver au village vie et activité en venant s’approvisionner à pied, à vélo. On se connaît, on s’embrasse sur le pas de porte avant de déployer une liste de courses plus ou moins grande. Aujourd’hui c’est promo sur le Coca, une bouteille offerte pour un pack de six !
14°C. Il fait encore chaud et presque beau. Mais le temps change imperceptiblement.
Ce sont les taons du bois de Chatenois qui le font comprendre, sans plus d’égard ni compassion. La progression devient soudainement pénible au milieu d’un essaim mobile et satellite de vingt à trente taons fougueux, au point de s’enhardir à explorer bouche et narines. La plupart se pose sur des parties du corps visibles et il est possible d’éviter les piqûres d’un brusque mouvement saccadé de bras ou de jambes. Mais certains, plus intelligents en tout cas plus vicieux que le reste de la bande, arrivent à piquer sur l’omoplate, dans l’interstice laissé libre entre le sac et le dos.
Imparable.
Douloureux aussi une double piqûre simultanée opérée conjointement par deux pervers kamikazes qui délivre un coup de fouet, une onde choc soudaine. J’essaye bien d’accélérer le rythme déjà soutenu, de marcher en battant des mains et des pieds, rien n’y fait, ils collent toujours comme des sangsues ailées... et zélées. A deux reprises, il faut stopper, à cent mètres de distance, balancer le sac à terre et se flageller à grands coups de chapeaux sous l’œil goguenard de joggeurs matinaux qui doivent légitimement remettre en cause mon équilibre psychologique ! Devenir immobile, visualiser l’effectif d’ensemble et s’attaquer méthodiquement à les exterminer un après l’autre, en résistant aux piqûres vengeresses. Ne pas capituler, car l’effectif s’éclaircit et la victoire prochaine. Quelle sale race véritablement les taons. A comparer, les moustiques dispensent presque des caresses sensuelles ! 
Châtenois les Forges puis Nommay s’étalent entre de vastes collines onduleuses, villages satellites de Sochaux avec ses rangées de pavillons bientôt engloutis par la conurbation voisine.
Passée l’autoroute A 36 – La Comtoise, le calme englobe à nouveau le GR. Il s’agit plutôt ici d’un agréable chemin de halage aux vertus apaisantes. Deux péniches blotties au creux d’une écluse fleurie somnolent, en arrière plan une rangée de peupliers, un peu de verdure et une eau au court imperceptiblement figé, bientôt constellé d’impacts rafraîchissants. Par beau temps, cet endroit paisible doit attirer les amoureux plus encore qu’un champ de blé.
 
 
Sous les hallebardes tonitruantes, le porche de la poste de Fesches le Châtel sert de providentiel abri où la nature contrariée du ciel oblige à essorer le tee-shirt. 
Recroquevillé dans un coin, les pieds à l’air, je soigne de nouvelles ampoules héritées du bitume, alors que de sympathiques clients venus à la poste me font gentiment la conversation. Certains compatissent sincèrement devant le spectacle peu engageant de mes pieds couverts de pansements, d’autres soutiennent d’un signe. Aucun n’émet d’opinion offensante sur mon allure de quasi clochard et j’apprécie la retenue. Car à cheminer quotidiennement dans des conditions de confort sommaires, victime des intempéries et pas rigoureusement rasé de près, on en arrive vite à perdre de sa superbe !
Ce modeste porche matérialise le quatre cent trentième kilomètre de la rando. Plus que trois cents pour le lac Léman, une broutille.
On me parle d’une amélioration du temps pour l’après-midi. C’est gentil, mais on ne me la fait plus celle-là !
La pluie redouble d’intensité et n’en fini pas de noyer le paysage sous des airs de 11 novembre commémoratif d’un été révolu. Le passage en forêt atténue à peine la sensation d’humidité latente. Une trouée dans les arbres. Une clairière rabotée de cinq hectares sur laquelle des rouleaux compresseurs laminent un sol de gravier. Aux banderoles de protestation populaire répondent les infernales norias de camions. Une tente est dressée au bord de la départementale. Un amas de palettes, des bâches, de loin cela ressemble à un squat en plein air. Il s’agit pourtant d’un lieu de résistance passive. Une poignée de militants écologiques manifestent ici leur mécontentement et colère de voir construire dans la forêt une usine de traitement des boues de stations d’épuration et de compostage de déchets végétaux. Ils se serrent les coudes autour d’un feu et de boissons chaudes.
La Communauté d’agglomération du pays de Montbéliard propose et ces écolos indisposent…
Je les encourage d’un signe de la main, que puis-je faire d’autre ?
Je portais de grands espoirs dans la possibilité de faire sécher dans les poches filets de mon sac une paire de chaussettes lavées à Thann. Peine perdue. Thann, quand était-ce ? Deux jours à peine et déjà si loin.
Plus d’une heure trente que je marche sous cette pluie, dans un sous-bois détrempé où très souvent le sol bourbeux oblige à patauger dans les ornières. Le petit village de Dasle fera bien l’affaire pour passer la nuit à l’abri. Mais où ? Le chapeau suintant d’un goutte-à-goutte persistant, j’interroge les secrétaires de mairie évidemment prises de court. Elles ne voient pas, ou parlent d’un gîte à Dampierre, dans la direction opposée. A force de persévérance accentuée d’une mine triste et désespérée un peu surfaite, elles m’octroient le préau de l’école toute proche. Mais c’est à vos risques et périls s’empresse d’ajouter l’une d’elles. Tient donc, menacerait-il ruine ?!!!
 
 
La fontaine décorative de la place de l’église n’est manifestement pas potable. Un panonceau indique que l’eau tourne en circuit fermé. Quelques pétales de fleurs, des feuilles mortes et autres mégots flottent dans le ressac.
J’y puise pourtant à boire, nécessité fait loi.
19h30, Monsieur le Maire passe rapidement jeter un œil, s’intéresse au parcours et évalue surtout l’invité surprise que je suis. Demain matin, il me proposera un café lorsqu’il arrivera.
J’espérais dormir tôt, me reposer de la marche humide, récupérer. Mais c’était sans compter avec les jeunes de la commune. De l’autre côté du petit portail de l’école, des voitures viennent se garer, techno à fond. Dasle devait avoir ces jeunes désoeuvrés et je m’apprêtais à une longue nuit, sans doute aussi à de la visite impromptue…
Durant près de deux heures, des aller et venues, de la « musique » inintelligible et des conversations d’ados sans grand intérêt aux formulations grammaticales bancales, puis soudain, une voix derrière moi :
-          Ca va monsieur, ça va ?
-          Oui ça va. Vous êtes qui ?
-          Gendarmerie monsieur, voyez mon uniforme.
-          J’y vois rien sans mes lunettes…
-          Qu’est-ce que vous faites là monsieur, vous êtes SDF ?
Celle là non plus on ne me l’avait encore jamais faite. Dans un demi sommeil, plissant les yeux pour y voir clair, j’essaye de distinguer à contre jour cette ombre qui me parle. Explication succincte de la rando : Wissembourg, GR5, pluie donc dormir là…
-          Non, je suis randonneur, le maire m’a permis de passer la nuit ici. 
-          Bien. Bonne nuit monsieur et bonne balade.
Le gendarme disparaît dans la nuit en m’assurant qu’il ne se passerait rien, que je ne serai pas dérangé par les jeunes.
Et ce fut le cas.
 
 

Date de création : 09/02/2008 @ 17:24
Dernière modification : 22/07/2008 @ 11:00
Catégorie : ALPES - GR5
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