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Fontaine aux Granges de Joigny
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ALPES - GR5 - JOUR 35
35e jour – 25 juillet 2005 (+8 de Thonon) 
 
Quel dommage d’avoir hier obtempéré à l’ordre impératif du panneau et d’avoir stoppé aux abords du refuge de la Balme. Le sentier grimpe à l’assaut du vallon en suivant la base de la ligne à haute tension et débouche sur un premier vallon particulièrement agreste et moelleux non loin des chalets de Jovets. Quelques tentes mal dissimulées avaient prévu le coup, sachant trouver ici calme, eau et terrain adapté. Les marmottes aussi bien sûr. Le sentier forme un coude et nous accédons à un second plateau moins vaste, recouvert en son centre par un grand tumulus : le Plan des Dames. La légende voudrait qu’ici reposent une dame anglaise et sa servante, surprises par la tempête. Qui sait si en affirmant à mon tour qu’un roi mérovingien y fut secrètement inhumé avec un fabuleux trésor, je ne créerai pas une autre légende ?!  
Un dernier raidillon plus difficile donne à gagner le sommet de l’alpage et atteindre le col du Bonhomme (2329 m). Gentil col bosselé entre deux vallées et surplombé de pics ou d’aiguilles de trois à quatre cents mètres plus hauts encore. De l’autre côté du col, voici le Beaufortain. En vous retournant, vous pourrez aisément admirer dans le lointain le plus grand des lacs Jovet ceinturé dans son écrin de rocailles d’où émergent à grand peine les premiers rayons du soleil.
Une toute petite cabane sommitale façon abri de jardin amélioré tient lieu d’abri en cas d’orage ou de vent violent. Et du vent il en faut pour dégager le ciel et le parer de ces plus rutilantes teintes bleutées. Une antique borne Michelin abattue par les éléments ou la lassitude de la verticalité indique des directions à même le sol. 
Sortie de nulle part, une jeune femme débouche du sentier. Finement vêtue d’un short minimaliste et d’un tee-shirt tout aussi court, elle gambade dans la montagne sans autre équipement qu’un walkman solidement fixé sur les oreilles. Ses basquettes sautent de pierre en pierre et elle disparaît aussi vite qu’elle est arrivée. Le temps de me retourner, elle a disparut. Ai-je imaginé ou rêvé sa présence ?
Une quarantaine de minutes d’efforts permettent d’atteindre le col de la Croix du Bonhomme (2483 m), sans risque ni dommage de se tromper tant le balisage et les cairns sont nombreux. Une solide colonne de pierre toise l’horizon au-delà des vallées du Beaufortain et de la Tarentaise. Une poignée de drapeaux tibétains l’encercle pour ne pas s’envoler au vent glacial. L’œil se perd sur les innombrables sommets, crêtes ou pics environnants dont la teinte subtile varie du bleu au gris.
La modeste table d’orientation du refuge situé à quelques pas du col permet de mettre un nom sur ces beautés révélées.
Bruno me rejoint au refuge et nous cheminerons ensemble jusqu’au soir.
La suite de l’itinéraire oblige à emprunter les crêtes des Gîttes et le sentier ouvert par les chasseurs alpins qui l’entaillèrent sur son versant nord, afin d’ouvrir un chemin militaire qui serait visible du col de la Seigne. Ce col juché sur la frontière franco-italienne est situé à dix bons kilomètres à vol d’oiseau, rien de moins. Les militaires ont bien travaillé, l’assise du sentier reste majoritairement plane, dans cette montagne de schiste friable qu’il va donc falloir traverser. Bruno passe devant, sifflote, s’arrête, se retourne tout à son aise. Pour moi le sentier est juste assez large pour que je n’aie pas le vertige, juste assez et je n’ai guère trop envie d’entamer ici une interminable conversation. Je me contente de regarder mes pieds, d’éviter de jeter un regard dans le ravin schisteux où rien ne me rattraperait si d’aventure… Terrible d’aimer ainsi la montagne et de subir le vertige à ce point. Le cheminement aisé mais peu confortable s’éternise une heure, sur cette crête qui n’en finit pas de monter, de descendre, de tourner et semble ne jamais devoir finir. Enfin le col de la Sauce (2307 m) pour délivrance. Si j’osais, j’embrasserai le sol gazonné de cette merveilleuse prairie grasse. Pas d’eau hélas car le bivouac y serait succulent face au déjà lointain refuge du col de la Croix du Bonhomme bien visible. Les tendres et verts alpages particulièrement fleuris amènent doucement jusqu’au refuge du Plan de la Lai et la jonction avec la route goudronnée. Des marmottes sifflent ici où là, des vaches ruminent sans se soucier d’autre chose que d’elles mêmes. Les fleurs des champs forment une explosion de couleurs et d’odeurs revigorantes après ces crêtes schisteuses, grises de tristesse et d’ennui.
La toponymie joue parfois des tours ou commet des erreurs, car il y a ici deux lieu-dit « la petite Berge » à peu de distance. A la première nous nous ravitaillons en eau et à la seconde, nous nous posons pour le casse-croûte. Idéalement située la cabane offre un panorama plongeant sur les eaux du barrage de Roselend en contrebas. Des champs fleuris, un ciel bleu et le lac en décor pour cette partie de campagne bucolique qui ravirait le cœur des amoureux.
Bruno sors ses victuailles, lit les données de son podomètre et reprend la conversation sur les montagnes, la beauté des paysages, etc. Il n’est pas l’élu de mon cœur évidemment ( !!! ), mais sa compagnie me fait paraître le temps moins long, les journées moins monotones. 
-          Pour l’instant en données corrigées, je pense qu’on a fait seize à dix-huit kilomètres depuis ce matin et qu’il nous en reste encore dix. Je tourne autour de vingt-cinq à trente kilomètres par jour ces temps-ci.
-          Oui, c’est pas mal, mais en montagne les kilomètres ne veulent rien dire.
-          C’est vrai, seul compte le dénivelé.
Et le prof de physique qu’il est d’enchaîner sur la structure des roches et de me demander le nom de telle ou telle fleur qui ici nous entourent de bonheur.
-          Cette clochette violette là, tu sais ce que c’est ?
-          Chez moi j’appelle çà tout bêtement une clochette !
-          Ouais, moi aussi !
Au bout de nos semelles, s’étire gracieusement le barrage de Roselend. Ce grand lac artificiel en forme de longue virgule est si vaste qu’il pourrait aisément contenir dix-neuf fois le Stade de France. Si l’on n’est pas footeux mais plus féru d’histoire et de grands espaces, le barrage de Roselend comblerait seulement quarante pourcent du parc du château de Versailles.
Nous échangeons camembert contre saucisson, chocolat contre gruyère et refaisons le monde à notre image.
Il a été écoeuré de voir sur le Brévent tous ces touristes, écoeuré de voir comment la montagne petit à petit est colonisée par l’homme dans le seul but de gagner plus d’argent, encore et encore. Quand je lui dit avoir bu là-haut un Orangina à 3,50 euros, il fulmine :
-          On plante des lignes électriques, des téléphériques, des restaurants d’altitude, où s’arrêtera t-on, grogne t-il en avalant la rondelle de saucisson à pleines dents. On bétonne tout, on donne accès aux sommets à n’importe qui pour de l’argent, toujours plus d’argent, je ne suis pas d’accord…
-           Oui enfin, ça permet aussi à des gens qui n’en n’ont pas les moyens physiques de découvrir un peu la montagne.
-          Même, je ne suis pas d’accord. La montagne doit demeurer un espace naturel, libre de constructions et surtout d’instincts pécuniaires qui détériore tout.
Nous restons en désaccord amical. A l’inverse de la conversation, le temps se terni rapidement. Il nous faut partir. Une longue marche d’approche en faux plat dans les alpages permet de contourner tranquillement le flanc de montagne jusqu’au petit hameau de Tréicol, à l’extrémité du lac. Ensuite cela se complique un peu avec la montée par la piste carrossable jusqu’au lieu-dit Presset. Bruno, ce bougre en petit short aux couleurs de la Bretagne est encore frais et me dépose littéralement dans la montée. Un bon dénivelé qui fait mal aux jambes mais qui n’est encore rien par rapport à la dernière montée du jour, celle allant au col de Bresson, situé à 2469 mètres soit encore cinq cent mètres à grimper, en fin de journée et à bout de forces.
Je suis sur les genoux et cette dernière montée finit de m’achever. Je marche quasiment au ralenti, à bout de force avec une difficulté croissante à simplement lever les pieds. Le sentier monte en deux terrasses, la première herbeuse et la seconde dans les éboulis grandioses à mesure que le brouillard noie le paysage. Récompense dérisoire, je mets cependant une heure tout pile contre une heure trente indiquée au panneau, à Presset. Un spécialiste de la course de ski alpinisme de la Pierre Menta qui dit l’avoir faite dix-sept fois nous a conseillé d’aller dormir plutôt au refuge de Presset. C’est un peu hors GR, mais il nous a convaincu avec le lac et ses beautés qui sauront nous charmer.
Une bonne quinzaine de bouquetins est tranquillement posée sur un gros rocher à quelques jets de pierre du refuge. Un merveilleux cadeau du destin après une aussi longue et difficile journée de marche. Le groupe est si compact que la place se fait rare sur le monticule minéral. Le mâle dominant se fait respecter, nul ne bouge, aucun ne songe à le contester. Dix minutes s’écoulent sans qu’ils ne s’effrayent de notre présence ni même esquissent une fuite. Perclus de froid, nous nous réfugions dans le chalet du CAF où le pot aux roses nous est dévoilé : le gardien du refuge a disposé une pierre à sel sur le rocher et attire ainsi les bouquetins qui viennent s’en délecter.  
Peu importe, la nature avec ou sans artifice nous régale de ses beautés.
Le refuge d’une modeste capacité de 22 places semble fait de bric et de broc. Un confort sommaire, pas d’eau courante ni d’électricité. Pas d’eau chaude donc pas de douche. Les toilettes se trouvent dans le petit cabanon en contrebas. Cette atmosphère de bout du monde confère au lieu tout son charme et son intérêt. Le gardien fait des merveilles culinaires avec trois fois rien d’équipement et de denrées. Ce soir, afin de m’échapper des traditionnelles pâtes ou bolino, je m’offre le menu gastronomique :  
 
● Crudités : carottes râpées, rondelles de tomate et persil.
● Spaghettis avec son œuf cru
● Tranche de Beaufort, le traditionnel fromage de pays
● Salade de fruits
 
Nous avons droit à un petit digestif local fait à base d’épines de sapins macérées dans l’alcool.
De quoi remonter le moral à défaut de requinquer les jambes !
Il y a du réseau et le téléphone passe à merveille. La concrétisation du bonheur à 2514 mètres. L’altitude du Brévent, avec les seuls avantages.
Carte, horaires et élévation de terrain de la semaine à venir
 
Carte disponible au téléchargement.
300 DPI, format A4. Référence : gr5.2

Date de création : 13/02/2008 @ 11:23
Dernière modification : 17/03/2008 @ 19:46
Catégorie : ALPES - GR5
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