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PYRENEES - GR10 - JOUR 15
Jour 15 – Lundi 26 juillet 2004 L’objectif du jour, sans être trop ambitieux serait d’atteindre les rives du lac d’Ilhéou (1975 m), avec un dénivelé positif de 1364 mètres. La météo semble favorable, je suis reposé et m’avance jovialement vers le pont du Labadé et marche doucement en direction du col des Bordères (1150 m), que je n’atteindrai jamais ! Je ne suis manifestement pas bien réveillé ce matin, car je perds très rapidement le balisage du GR10, au dessus de l’arboretum d’Arrens, c'est-à-dire à une demi heure du départ… Me voilà cheminant sur un large replat herbeux d’où la vue porte alentour et comme un con de débutant je me mets dans l’idée que le col des Bordères est proche, car le lieu symbolise à merveille un col et que la haie de barbelés pourrait tout aussi bien être cette « bordère », cette bordure. Quel con je fais ce matin ! De ce replat à déjà bonne altitude, je grimpe encore dans un bon vallon herbeux de belle inclinaison où une foultitude de zigzags improvisés en hors piste, excessivement serrés me permettent enfin de débouler sur l’autre versant de la colline, au pied du Pic de Habouret (2036 m), alors que mon bon GR10 serpente docilement entre les collines, à deux bons kilomètres de là, plus au Nord et bien plus bas. Ce qu’il m’a été bien difficile de grimper doit être descendu pour retrouver sur l’autre versant, toujours plus bas aussi, le balisage (rouge et jaune) du GR de pays du Tour d’Azun. Me voilà sur un sentier balisé qui n’est pas le mien certes, mais sur un sentier balisé qui me permet de me localiser avec précision et puisqu’il rejoindra bientôt le GR10, je l’emprunte sans plus de réticence. Posé sur le sentier, un sac à dos et au dessus de lui, un corps plié dans la pente du feuillage vert et dense, s’active avec lenteur. Un randonneur faisant le GR en sens inverse, parti de Cauterets et désireux d’aller à Saint Jean Pied de Port est paisiblement affairé à ramasser des airelles. Je discute un peu avec lui, de tout et de rien, de la balade, des points d’eau, de Cauterets. Bizarre personnage qui ne lève pas un instant le nez de ces airelles pour me parler. Ce sera pour le repas de ce soir, me dit-il, en enfonçant délicatement les petites billes bleues au fond d’un sac plastique de supermarché bien défraîchit. Le sentier descend à travers les pâturages en friche se teintant inéluctablement de végétation arborée, signe évident d’abandon de transhumance, ou de pacage, d’élevage endémique aussi. L’exode des jeunes et la fin des vieux. Une antique grange aux larges pierres d’angle et au toit de lauze se veut le dernier rempart face à l’invasion lente mais inexorable des arbres qui peu à peu colonisent les flancs de la montagne sur fond de ciel d’un bleu azur magnifique, où quelques nuages saupoudrés s’aventurent sans hâte. J’opère la jonction avec le GR10 peu avant le hameau de Viellette (1075 m), sur la D103. Je le suis de nouveau, avec satisfaction, même s’il ne s’avère être qu’un sentier fort inutile qui longe tout au plus la route goudronnée, à l’orée du bois. A la hauteur du camping (les Colonies) il est donc inutile de perdre son temps comme je l’ai fait sur le GR, mieux vaut atteindre le lac d’Estaing (1161 m) par la route goudronnée car la circulation n’y est tout de même pas exponentielle ! Moi qui imaginais le lac d’Estaing comme un splendide lac d’altitude niché au creux d’un cirque de montagne solitaire et sauvage, j’en suis pour mes frais ! Niché au creux d’un cirque de montagne oui, mais pour le côté sauvage, vous repasserez ! La route goudronnée y mène sans encombre son petit flot de touristes qui tous, trouvent aisément à se garer à l’ombre des bosquets et peuvent aisément étendre la nappe qui au bord de l’eau qui à l’ombre ou sur un bout de pelouse. Les chiens gambadent en liberté et les marmots jappent en tous sens à moins que ce ne soit le contraire ! Une odeur de barbecue émane de certains campements bariolés où fleurie la nappe à carreau du dimanche. Toujours différente et pourtant partout la même, poisseuse mais appétissante. Ma gourde souple est vide. Je n’ai plus d’eau à proximité de ce lac. Un comble ! J’ai épuisé les trois litres qu’elle contenait depuis le départ d’Arrens, quatre heures auparavant. Je suis stupéfait de cette pénurie soudaine alors que je pensais avoir encore près d’un litre. La buvette est à cinq cent mètres, trop loin pour que j’aille y tremper mes lèvres et remplir ma gourde. C’est en pleine connaissance de cause que j’attaque la longue montée en direction du col d’Ilhéou perché à 2242 mètres. Cela m’épargnera le port de trois bons kilos de flotte, aux heures les plus chaudes et difficiles de la journée, mieux vaut alléger le sac de poids superflu. Je finirai bien par trouver quelques pissous sur le chemin. Sans doute y a-t-il même une fontaine à la cabane Arriousec toute proche ? Grimpant en sous-bois sur un bon sentier pentu, une demi heure est nécessaire pour découvrir cette jolie cabane qui pourrait être la jumelle de celle vue plus avant, avec ses grosses pierres et son toit de lauzes. Pas d’eau apparemment autour de la cabane réservée à l’usage exclusif d’un berger comme l’indique un panonceau cinglant. On sort bientôt de la forêt, pour décrire un coude à gauche et grimper en pentes douces les alpages d’un cirque au fond duquel somnole tout là-haut à gauche, le col d’Ilhéou encore lointain. Le sentier est large, visible, unique et bien balisé aucune raison ou possibilité de se tromper là. Pas d’eau à la cabane, ce sera pour plus tard. Quelques mamelons s’enchaînent. Désillusion. A chaque fois, j’espère trouver de l’eau au coin d’eux. A chaque fois l’espoir est trompé. Allez hein, le prochain c’est le bon. Non ? Bon ben, le prochain « prochain » alors… Un ruisseau puisant coule bien au fond du vallon, mais à quoi bon descendre jusqu’à lui alors que le sentier devrait bien finir en montant, par s’en rapprocher, le longer ou franchir. Finalement avant d’attaquer le pied de la montée plus abrupte vers la cabane métallique verte décrite dans le topo guide, une passerelle de bois se présente, sous laquelle coule un beau ruisseau, à cinquante minutes d’Arriousec. Calmement, adossé à l’énorme rocher faisant face à la passerelle, jambe étendue sur la pelouse touffue, je goûte un juste repos en avalant mon litre réglementaire d’eau fraîche. Cinquante centilitres seulement figureront ma réserve, pour plus tard, car je n’éprouve pas l’envie ineffable et manichéenne de vider totalement mon sac à dos, de remplir la gourde et de refaire mon sac avec trois litres d’eau qui feront trois kilos supplémentaires à porter. Cette fois-ci c’est niet. Le col est encore loin, le col est encore haut. Une poignée de vaches couchées et passives, mâchant bouches grandes ouvertes, peu stressées et visiblement parfaites pour un séjour en Inde, matérialisent un replat et une intersection, avec la cabane verte à droite. Le sentier du col d’Ilhéou est évidemment celui de gauche, celui qui grimpe le plus, qui monte le plus droit, le plus longtemps. Il est en ainsi depuis le début ou presque. Lorsque la fatigue s’en mêle, à une bifurcation, vous pouvez être certains que le GR10 et toujours celui qui grimpe le plus, le plus longtemps et le plus sûrement. A la longue, cela en devient tellement évident qu’en arrivant aux intersections en pleine montagne, j’opte toujours pour la pente ascendante et ne cherche le balisage qu’ensuite. C’est ainsi, question d’habitude ! Dès lors, l’ascension au col se fait moins aisée, plus pesante sur un sentier au lacets innombrables et dont la déclivité semble accrue à chaque pas tenté. La grimpette est sans danger, dans les verts alpages maintenant territoire exclusif des moutons, indice implacable de prise d’altitude ! Parfois je suis plié en deux, le dos presque à l’horizontal, tant la pente me semble malaisée et la fatigue omniprésente. Le souffle court ne voit qu’une seule issue, par le haut, monter et monter encore malgré une déficience évidente. On en fait de belles choses avec des produits « stimulants » que le médecin de campagne ne peut détecter sur le microscope qu’il a offert à son fils pour la Noël. Mais j’aimerai bien le voir un peu avec un sac à dos et des chaussures de marche, le roi de la pédale. On verrait combien de cols il peut enquiller dans la journée, sans son équipe technique, ses massages du soir, son médecin, son nutritionniste, ou son « soigneur-chimiste ». Amstrong a remporté son 7e Tour de France. Tu parles d’un scoop. Comme quoi être victime d’un cancer des testicules ça aide pour beaucoup de choses ! Seuls les commentateurs sportifs vaguement apparentés à des journalistes, dont l’employeur public retransmet l’évènement planétaire à vil prix, sont suffisamment candides pour supposer ce sport propre et les athlètes honnêtes. Faut pas faire semblant d’avoir des peaux de sauc’ devant les yeux, les gars… Enfin, on aura beau dire, le cyclisme est tout de même un sport généreux et altruiste qui a le mérite d’accueillir en son sein protecteur un nombre croissant de malades relevant de problèmes respiratoires comme l’asthme. Quand on vous dit que le sport c’est bon pour la santé, il faut les croire ! Le Tour de France, c’est joli vu du ciel, moins des poubelles. Le ciel se couvre de nuages, il fait un peu froid, avec seulement 12°C et une belle brise sur le plateau sommital du col d’Ilhéou (2242 m). Je casse une petite croûte car j’ai les jambes en coton ou peu s’en faut et de plus personne n’est là pour me tendre une musette bourrée d’énergie. Un mini cirque de montagne, une grosse flaque d’eau partiellement asséchée et des chevaux en liberté. Au dessus, un milan inspecte son territoire d’un vol silencieux oublieux du moindre mouvement d’ailes. Le point culminant de la journée franchit, je ne m’attarde guère au col d’Ilhéou qui serait un agréable et vaste lieu de bivouac, car l’orage semble vouloir s’inviter au bal et qu’hélas ma tente se transforme bien trop vite en citrouille dégoulinante, bien avant que les douze coups de minuit n’aient retentis ! La descente vers le lac d’Ilhéou se dévoile tranquille et sympa, sur une large piste de terre au milieu de nouveaux alpages ou de nouveaux chevaux en liberté broutent à proximité de nouvelles cabanes d’Arras. La balade est si facile et praticable que des familles en jeans et baskets des grands parents aux petits derniers la réalisent. Ils sont sur le retour, sans doute vers le lac d’Estaing, car ils s’étirent en une colonne de deux cents bons mètres. Certes le temps est gravement nuageux, mais est-ce pour autant besoin d’abandonner l’arrière garde des grands parents ?!!! Au centre de la verdure grouillante, un grand panneau blanc attire l’œil au milieu de nulle part. Le sentier de gauche permet de descendre directement sur Cauterets, tandis que celui droite invite à gagner le lac et le refuge d’Ilhéou via un léger détour. Mais que ne ferai-je pas pour aller admirer un lac de plus ?! D’immense à large, la voie rétrécit à un sillon d’un petit mètre, où alternent terre et pierre, à flanc de colline, jusqu’à surplomber rapidement un petit lac. Quoi ? On serait venu jusque là pour voir cet étang de rien du tout avec à son extrême extrémité un refuge pointu juché sur un promontoire ? Un dernier virage rétabli la réalité des faits : d’abord le lac Noir symbolisant une grosse larme effilée, puis le refuge fermant un cirque de montagne au fond duquel se blottit le lac d’Ilhéou (1975 m), couronné de pics acérés et chapeauté de brouillard. Sous un ciel lumineux et un soleil rayonnant le cadre lacustre doit dégager plus de poésie et de romantisme. Aujourd’hui, c’est plutôt le spleen qui prédomine. Le spleen est même la morosité devant ce refuge privé qui se permet de vendre l’eau et demande ainsi une tonitruante participation de trente centimes d’euros pour le remplissage des gourdes d’une « eau très fraîche » ainsi que pour l’utilisation des toilettes « mises aux normes européennes ». Un groupe électrogène tourne à plein régime et le vent en rapporte les gaz d’échappements. Le panneau des prohibitifs tarifs ainsi que les odeurs pestilentielles n’encouragent guère à s’inviter au gîte. Quelques tentes ont trouvé refuge sur les mamelons entourant le lac et c’est sans doute mieux ainsi. Je fais quelques photos et m’en vais bien vite, de peur que le triumvirat de commerçants à qui appartient le gîte à l’allure biscornue ne me demande de payer également pour l’air puant que je respire pourtant. Je n’avais encore jamais observé que l’eau était payante dans un refuge de montagne où je pensais naïvement que certaines notions élémentaires comme l’hospitalité pouvait encore avoir cours… Je pars aussi rapidement car la bourgade de Cauterets n’est mentionnée qu’à trois heures de marche. Une broutille ou presque où il me plairait d’être demain matin car on peut y consulter internet semble t-il et j’aurai ainsi la possibilité de faire graver un CD Rom de photos numériques, la capacité de mes cartes mémoire n’étant pas extensible et arrivant presque à amplitude optimale. Et cette fin d’après-midi, la descente dans les pierres du sentier qui coupe et raccourcie considérablement la route carrossable est presque un enchantement tant je prends plaisir à la dévaler, trottinant d’un bon pas chaque fois que cela est possible. Au niveau de la gare de téléphérique, je suis la route goudronnée, plus uniforme pour les pieds et moins éprouvant pour les genoux, jusqu’à atteindre Cauterets sans presque m’en rendre compte. Dans les derniers lacets au dessus de la ville, je songe au jeune couple rencontré aux chalets Pedro et d’Irati et qui faisait la HRP. Ils voulaient aller jusqu’à Cauterets. Nous y sommes. J’y suis en tous cas. Rien de transcendant, puisqu’une étape, un nom sur une carte et non un but ultime. Sont-ils arrivés jusqu’ici ? Les genoux accusent le coup de la descente sur les chapeaux de roue, en deux heures au lieu de trois certes, mais le droit se consolera difficilement d’une pâle médaille du mérite à titre posthume ! Mais je suis déjà à Cauterets, ayant réalisé trois étapes en une, selon le descriptif du topo guide qui préconisait surtout de faire : Arrens – lac d’Estaing puis lac d’Estaing – refuge d’Ilhéou et enfin Ilhéou – Cauterets, soit vingt neufs kilomètres dans la journée. C’est pas mal du tout çà surtout avec le dénivelé en question ! Il est 19h30 et ne sachant trop où aller, je me pose sur un banc public, sur un « sentier de promenade » urbain. Je tâte le terrain du bout de la chaussure et juge de la fréquence de passage. Une heure plus tard, je monte timidement ma tente dans l’herbe rare, près du banc, tout en bordure du chemin en gravier. Des gens passent sur le petit chemin situé entre une allée de HLM et ses parkings et une route en contrebas. Cadre idéal pour bivouaquer, dans la discrétion et la tranquillité ! Un tout petit bambin demande intrigué à ses parents : - Il va dormir là le monsieur ? - Oui, tu vois, il a monté sa maison. Je sors la tête de la tente et salut le gamin de la main qui, tout en s’éloignant dans les jambes de ses parents, se retourne curieux. D’autres promeneurs passent et je gagne un peu d’intimité en préparant ma bouffe derrière la moustiquaire. Au souper, le morne ordinaire : gruyère, soupe savoyarde, semoule en sachet individuel. J’ai fini le quatre quart sur le banc, en attendant patiemment la fin du jour. D’ordinaire, lorsque par obligation ou contrainte, je suis tenu de dormir en agglomération, j’essaye de repérer de très loin ou de très haut une zone de verdure excentrée comme un stade de foot par exemple, où je sais pouvoir planter ma tente sans trop de difficulté, comme cela avait été le cas à Modane, à l’automne 2003. Bizarrement, Modane et Cauterets me donnent la pathétique impression d’être villes jumelées tant les similitudes sont nombreuses, même ciel gris et triste d’automne morne, même type d’immeubles glauques aux couleurs blafardes, même température fraîche emplie d’humidité stagnante. Enfin, cela ne sera rien si demain j’ai l’opportunité de graver un CD de photos. D’après mes estimations un peu hasardeuses et en tout cas optimistes, j’envisage d’aller à Bagnères de Luchon en six jours, depuis Cauterets, via le col de Riou… 8h39 de marche effective Date de création : 06/03/2008 @ 17:35 Réactions à cet article
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