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CHARTREUSE - GR9 - JOUR 2
2eme jour – mercredi 16 juillet 2008 Des granges de Joigny à l’habert de l’Aup du Seuil.
Parti à 8h05 des granges de Joigny toujours dans l’ombre, sur un agréable petit sentier tranquille pour descendre sur le minuscule hameau des Pins et trouver enfin le soleil. Rien de bien folichon aux Pins. Une poignée de maisons au bord de la route et voilà. Une petite vieille qui regarde suspicieusement du coin de l’œil alors qu’elle gratouille dans son jardin. La route justement va servir pour aller jusq’au hameau de la Plagne, en passant par les Brancaz et la Grenery. Dans le dernier kilomètre avant la Plagne (1100 m), je suis doublé par une bonne dizaine de voitures. Normal, car c’est depuis ce hameau situé en cul-de-sac qu’on monte en direction du plateau de la Chartreuse et des alpages vers le col de l’Alpette. Une fontaine placée fort à propos permet un dernier ravitaillement frais. Il n’est pas nécessaire de trop se charger en eau, car il y en aura sitôt franchit le col. Une longue colonne d’une quinzaine de randonneurs du troisième âge, avec deux jeunes enfants s’ébranle doucement en direction du sommet. Je les suis à dix minutes.
Le panneau indique 1h30 pour le col. Mais sans se presser trop, une heure suffit en montant à son rythme. Le sentier est de bonne déclivité mais sans danger : on marche loin du précipice ou supposé tel et pourtant une barrière vient protéger la partie droite du sentier, pendant les vingt dernières minutes. Même s’il n’y a pas vraiment de danger, c’est tout de même sécurisant. En sortant à ciel ouvert, face à l’impressionnante masse du Granier, le sommet de cette montagne à vaches est proche. Le col de l’Alpette (1530 m) est matérialisé par une large clôture de barbelés et une croix de pierre. A quelques minutes à peine sur le GR, en direction des cabanes, une belle fontaine et des abreuvoirs à vache. L’eau est fraîche et le débit exponentiel : 1 litre rempli en 5 secondes. Nous verrons plus loin l’exemple inverse !
Joli paysage d’alpage avec des vaches éparses, variées, et portant fièrement des cornes, ce qui devient de plus en plus rare pour la gente bovine. D’autres abreuvoirs disséminés…
Dans la petite prairie ceinturée de rochers, voici le refuge de l’Alpette (1500 m) réservé au berger. Les randonneurs qui souhaitent passer une nuit à l’abri se doivent d’aller à la cabane située juste en face. Elle n’est pas compliquée à identifier : c’est cette grosse bâtisse coiffée d’un toit de tôles rouillées qui, déjà de l’extérieur n’apparaît pas très engageante. Et vous n’avez encore rien vu de l’intérieur, quelle cabane !!! Trois ou quatre vieux matelas rongés par on ne sait qui, on en sait quoi posés à même le sol. Une table de conception « artisanale » encadrée de massifs troncs d’arbres dignes de Gargantua. Une propreté limite malgré des grandes photos explicites invitant le randonneur de passage à ne pas oublier ses déchets. Une isolation envolée, des fenêtres laissant difficilement passer le soleil du midi, un poêle d’aspect non domestique, une « échelle de meunier » façon travaux du bâtiment confèrent à cette cabane un aspect bien pitoyable d’agglomérat malhabile de camp de gitans où on a guère envie de s’arrêter… D’ordinaire je ne suis pas difficile pour le bivouac. Il est évident que par temps d’orage, cette cabane est mieux que rien. Pour le reste, préférez emporter votre tente pour dormir au propre, « chez vous » sur la prairie. Par bien des points, cette cabane me rappelle cet algéco de chasseurs où j’avais été contraint de dormir au pays basque (Pyrénées – GR10).
Au refuge qui par effet de miroir passe désormais pour un palace de la Côte d’Azur (!!!), on fait du fromage. Naïvement, une randonneuse ayant vu les troupeaux de vaches dans l’alpage demande si ce sont des tommes de vaches. Quoi de plus logique ? Pas du tout, c’est du fromage de chèvres, de ces huit qui occupent la moitié de la cabane pour s’abriter du cuisant soleil. Je serai tomber dans le panneau moi aussi. Et me serai surtout laissé tenter à acheter un morceau de tomme de vaches. Dommage.
26°C à 13 heures.
Le GR9 se poursuit en léger faux plat dans l’alpage boisé. Bon balisage de peinture. Jamais de cairns, ou alors exceptionnellement et constitués de trois ou quatre petits cailloux. Des bébés cairns en pleine croissance, en devenir, un jour peut-être ! On débouche en trois quarts d’heure sur la prairie des haberts ruinés de Barraux. La carte au 1/25.000e indique ici même une source, à l’Est, à une centaine de mètres hors du sentier. Un groupe de promeneurs accompagnés d’un guide de randonnée stationne tout près, écoutant sans doute avec intérêt l’histoire du massif ou les légendes de Chartreuse. Belle vue sur le Granier avec des champs de fleurs au premier plan. Une autre quarantaine de minutes permet d’atteindre dans un alpage facile montant en faux plat, le chalet de l’Alpe (1667 m). Pas d’eau, pas âme qui vive. Juste une odeur âcre et désagréable de déchets plastique qui terminent de se consumer dans un brasero. Pas la peine de trop s’attarder ici. Je doute que l’on puisse y demander de l’eau. Sans doute vous conviera t-on à aller puiser à l’abreuvoir situé en surplomb et où se mêlent chevaux et vaches. Il faudra compter une bonne dizaine de minutes pour sortir doucement des champs de lapiaz qui encerclent la cabane.
La progression est lente et le pied parfois hésitant. Suivre le marquage au sol jusqu’au Pas de l’Echelle (1650 m) et sa croix gravée. Pour la distinguer, il suffit de descendre quatre ou cinq pas et de se retourner. Alors apparaîtront les croix gravées dans le rocher symbolisant la frontière antique entre la France et la Savoie.
Pas de difficulté particulière dans la descente du Pas de l’Echelle, pas même d’échelle, juste une poignée de lacets serrés sans difficulté. Plus loin le vallon de Pratcel ferait une bonne aire de bivouac, à la sortie de cette gorge étroite. Bifurcation pour l’habert de la Dame (1554 m), qu’un sentier en sous-bois permet d’atteindre en contournant à bonne distance la barre rocheuse qu’on ne distingue pas. Parcours sans trop de difficulté, mais avec une pointe de déception à l’arrivée, car une fois de plus, cette cabane est fermée et n’offre rien d’intéressant au randonneur solitaire. Il est écrit sur cette cabane comme sur d’autres à venir qu’elle est louée au berger. Bon d’accord, mais où est-il ce berger ? Il dort à points fermés et à double tour ??? Je doute que pour garder trois vaches (des races à viande qui plus est), il y ait trop besoin de berger ? Il n’y a pas d’eau, la cabane est fermée et aucun coin de bivouac possible sur cet alpage arc-bouté dans la pente truffée de gentianes jaunes comme autant d’épines de porc-épic.
Le temps change inéluctablement, le ciel se couvre, devient orageux, bientôt menaçant.
Il faut contourner l’alpage vers le Sud en direction du col de Bellefond maintenant bien visible, pour arriver en un quart d’heure à ce qui fait figure de source, sur la carte du moins. Un gros abreuvoir circulaire en plastique noir sous un arbuste malingre est alimenté par un large tuyau en plastique rigide, dont la canalisation est bien explosée à la source. Moralité, cet abreuvoir de bric et de broc offre avec parcimonie une eau de qualité douteuse dans laquelle pataugent de petits mollusques. Ben quoi ? Il fait chaud pour tout le monde et on se rafraîchit comme on peut ! 50 centilitres péniblement récoltés en dix minutes, soit un goutte-à-goutte patient. Trois secondes pour boire tout ça et recommencer ! Impossible de bivouaquer ici non plus. Il n’y aura pas plus d’emplacements propices d’ici à la prairie de Marcieu. Peu après une bifurcation avec le sentier descendant dans le cirque de Saint Même, une croix gravée sur une pierre rappelle que nous pénétrons dans l’ancien territoire des Chartreux. Au sortir de la forêt, on découvre doucement la prairie de Marcieu, constellée de creux et de bosses, d’herbes de hauteurs variable, de cailloux ou rochers. Ce n’est pas encore là que l’on pourra planter la tente… Un minuscule cube à l’horizon tient lieu de phare vers lequel marcher encore un peu malgré la fatigue et le sac pesant. Sans doute y apparaîtra une solution envisageable de bivouac ? Le cube se rapproche, amorce une métamorphose, se prolonge de pieds pour devenir en réalité une grosse citerne de béton circulaire. Balisage immanquable dessus, comme l’inscription « eau non potable ».
Marcher encore un peu, monter dans l’alpage bosselé pour découvrir la perle rare, l’expression de la platitude herbeuse par excellence. Les ruines peu reluisantes des haberts de Marcieu, tas de pierres efflanqués dispensent l’hospitalité aux seules marmottes. A moins d’un kilomètre, légèrement sur la gauche voici le toit d’une cabane de bien meilleure facture : l’habert de l’Aup du Seuil (1656 m). Les dernière forces sont jetées pour sortir du sentier et venir s’allonger juste à côté de la cabane, là même où demeure bien visible encore les traces d’une tente dans le gazon raz écrasé. Devinez quoi ? La cabane est fermée, réservée au berger ! Peu importe. Cette petite pelouse, rare endroit presque horizontal suffira pour la nuit. Un large bassin pouvant faire pâlir d’envie quelques citadins à la piscine étriquée assure l’approvisionnement en eau.
18h50. L’horizon est bouché par la colonne vertébrale que constitue la crête des lances de Malissard. Là-haut, sur un rocher, gît une inscription gravée dans la pierre depuis des temps lointains : « HOCUSQVIIAVIIORUM », qui signifie « jusqu’ici le territoire des Avéiens ». L’intérieur est peint de rouge pour mieux faire ressortir les lettres du rocher. On pense que cette inscription « romaine » est vieille de plus de18 siècles. Sans doute irai-je lui faire révérence, un jour !
Excellente journée de marche avec beaucoup de distance parcourue, un peu de dénivelé aussi et une météo encore clémente quoique bien orageuse.
Durée effective de marche : 7h30.
Date de création : 31/07/2008 @ 10:47 Réactions à cet article
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