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ALPES - GR5 - INTRO
Le ciel pousse un flot incessant de nuages peu engageant au dessus du clocher. Assis face à la magnifique abbatiale Saints Pierre et Paul, je scrute avec scepticisme les méandres incertains d’un firmament sensé se parer d’azur en ce début d’été. . Mais il n’est plus temps de renoncer. Ce n’est pas le splendide édifice du XIIIe siècle, ses fresques ou vitraux qui m’ont attiré dans ce bourg alsacien cossu. Je ne suis pas venu à Wissembourg pour apprécier le riche patrimoine architectural, encore moins pour parfaire mes connaissances bien parcellaires en œnologie. Je suis venu à Wissembourg pour mieux la quitter, au plus tôt et m’enivrer à satiété du plaisir intense de la randonnée. Face à l’abbatiale, dos à la fameuse maison du sel, en plein cœur du village fleuri, l’Allemagne n’est plus loin à vol d’oiseau : un kilomètre au Nord et un kilomètre à l’Est, c’est la frontière. Wissembourg aux marches de l’Empire ! . La boussole de mes envies oriente plus volontiers mes pas vers la chaleur du Sud. Chemin faisant il me plairait d’atteindre le clément rivage méditerranéen, loin, si loin. De l’autre côté de la France, autant dire au bout du monde ! Pas tout à fait béotien de la randonnée en solitaire, j’ai commencé par arpenter les Alpes sur le GR5 et traversé avec plaisir et succès les Pyrénées dans leur intégralité, d’Hendaye à Banyuls soit de l’Atlantique à la Méditerranée (été 2004 – GR10). Huit cents kilomètres de bonheur intense et un dénivelé positif représentant cinq fois l’ascension de l’Everest, avalé en quarante deux jours. Chaque nouvelle rando est l’aboutissement d’un projet plus ambitieux, toujours plus long et dans laquelle je puise sagesse et plénitude, émerveillement et félicité. Cette fois-ci, toujours en autonomie quasi complète, doté d'un équipement volontairement allégé, sobre et restreint, je vais tenter de cheminer des lignes de crêtes constellées de châteaux alsaciens, aux forêts du Jura. La paisible Suisse et le lac Léman s’effaceront avant de présenter mes hommages au Mont Blanc. De la Vanoise au Queyras, je gagnerai doucettement le Mercantour et la vallée des Merveilles, puis descendrai prestement toucher du doigt la Méditerranée, à Menton au terme d'un éprouvant mais merveilleux " péditour " alpin de mille trois cents quarante kilomètres. Sur le papier, cela s’écrit en deux ou trois lignes, insignifiantes. Départ « ici » et arrivée « là » à l’autre bout du trait qu’un œil oisif a parcouru d’un survol rapide. Les cartes elles, à aucun moment jamais ne retranscrivent l’énormité des distances et du dénivelé conséquent, de la fatigue, de la soif ou de la chaleur écrasante qui m’attendent au coin du bois ! Et c’est sans doute mieux ainsi… . Mais à chaque jour suffit sa peine. La mienne semble bien légère, noyée sous un flux prodigieux où se couplent la fougue inaltérable de l’adolescent ivre de liberté et la sage anxiété du randonneur averti. L’adrénaline envahit inéluctablement mon corps qui trépignait d’impatience. J’empoigne mon sac à dos et quitte la cité en direction des premières collines verdoyantes : je suis enfin en « état de marche ».
Date de création : 24/11/2007 @ 12:07 Réactions à cet article
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